Les inspirations :
Parmi les nombreuses influences aperçues sur le catwalk de Miuccia Prada, on retiendra avant tout l'esthétique de la chorégraphe allemande Pina Bausch, l'oeuvre du cinéaste Rainer Werner Fassbinder (et plus particulièrement son héroïne Lola, une prostituée menant une double vie), mais aussi l'art industriel et le mouvement constructiviste.
La femme Prada :
Empruntant aux années 70 leur élégance liquide, leurs fourrures et leur longueur midi, la femme Prada de l'automne/hiver 2014-2015 dissimule sa fragilité sous des manteaux cintrés de diva disco et des pardessus trop grands empruntés à la gent masculine. Et si la nuit elle se glisse au sein de tenues translucides (assez peu affriolantes en dépit de leurs détails froufroutants), ce n'est que lorsqu'elle s'affranchit des stéréotypes de la sensualité que cette jeune femme au chignon tiré et au mascara de baby doll réussit à exprimer pleinement sa féminité. Il est vrai qu'elle n'apparaît jamais aussi fascinante que lorsqu'elle réchauffe ses toilettes de soie au contact d'un pull-over oversize ou quand elle porte ces derniers comme une robe à part entière. Froide et imparfaite, cette Lola revue et corrigée par Miuccia Prada assume ainsi une allure ambiguë, entre classicisme rétro, opulence colorée pesante et impudeur sombre.
La collection :
Semblant comme muées par une force irrésistible, nombreuses sont les composantes du vestiaire Prada qui gagnent en puissance au fil des passages. On pense notamment à la veste d'uniforme aux teintes chastes, qui s'enhardit dans un premier temps au contact de touches de fourrure colorée avant de se voir déclinée en or clinquant, aux combinaisons transparentes évoluant vers des modèles tout d'abord monochromes puis richement imprimés ou encore aux bandes de fourrure éparses finissant par s'agglomérer sous la forme de toilettes à poils longs. Des pièces tout en contrastes qui composent des silhouettes abruptes au drame à fleur de peau, à la réalité intense et à la sophistication intello.
Le dress code :
Sur le podium, les robes se portent en dessous du genou (de manière à flirter avec le haut de la botte et ne rien laisser apparaître de la peau), les pull-overs trop grands aux immenses cols V réchauffent les soies (lorsqu'ils ne se portent seuls sous un long manteau), tandis que les foulards se déclinent en format cravate et se nouent sur le côté en un noeud simple, permettant ainsi à l'une de leurs extrémités de dégouliner le long du buste.
Les pièces fortes :
Si les manteaux aux bandes de fourrure contrastée - qui brillèrent par leur opulence et leur colorama osé - devraient faire le miel des Prada addicts, les robes en soie et les amples pull-overs pourraient quant à eux séduire bien au-delà de l'habituelle clientèle de la griffe. De leur côté, les bottes compensées redonnèrent un peu de lustre à une tendance que l'on croyait appartenir au passé.
Ce que j'en pense :
Aussi glaciale et complexe soit-elle, cette collection n'en demeure pas moins l'une des plus commerciales - dans le bon sens du terme - que Miuccia Prada n'ait jamais livrée. Alors que plusieurs semaines de gestation sont généralement nécessaires avant de réussir à apprécier le travail de la madone italienne, difficile en effet de ne pas vouloir s'approprier sur-le-champ cette élégance acérée qui n'hésite pas à délaisser beauté convenue et facilité esthétique au profit de l'audace du style...
Par Lise Huret, le 22 février 2014
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