Carmen grandit simplement à la campagne, ce qui n'empêche pas ceux qui l'entourent de faire prendre conscience de son incroyable beauté à la jeune brunette aux yeux turquoise. Elle est élue Miss de son village et gagne un concours rassemblant toutes les filles du conté. Elle pense alors à se présenter aux élections de Miss Estonie lorsqu'un événement va venir bouleverser ses plans. Carmen se trouve dans un supermarché de Tallin lorsqu'un chasseur de têtes délégué par une agence de mode italienne la repère et lui propose de s'envoler vers Milan pour commencer une carrière de mannequin...
La perspective de voir sa fille partir loin d'elle - alors qu'elle n'a que 14 ans - n'enchante guère Madame Kass, qui se contenterait pour elle du titre de Miss Estonie. Mais Carmen voit les choses bien différemment. Celle qui depuis son adolescence aime de plus en plus la mode et dépense ses maigres économies dans des vêtements incroyables, n'a qu'une envie : connaître autre chose que l'Europe de l'Est et partir pour le saint des saints en matière de glamour : Milan.
Pour cela, elle contrefera la signature de sa mère, et partira pour 3 mois dans la métropole italienne. Elle signe ensuite un contrat avec une agence estonienne, "Baltic Models", qui gérera sa carrière jusqu'à ses 18 ans. Dès sa majorité, en 1996, elle met les voiles et intègre une agence parisienne.
Elle ne tarde pas à être castée pour défiler lors des collections Chanel et Versace. Son apparition sur les catwalks ne passe pas inaperçue, et le mois d'après elle fait la couverture de l'Officiel et de Vogue. Pour la jeune fille, il n'est pas facile de s'adapter à ce nouvel environnement. Elle est bien consciente que si dans un premier temps seul le physique compte, pour faire perdurer une carrière il est nécessaire de comprendre ce qu'il se passe autour de soi, et pour cela il est absolument indispensable de maîtriser l'anglais, ce qu'elle fera rapidement.
En 1999, la jeune fille a fait du chemin et est de quasi tous les défilés de la saison : Alberta Ferretti, Gianfranco Ferré, BCBG, Calvin Klein, Chanel, Louis Vuitton, Valentino, Christian Dior, Gianni Versace, Anna Sui, Jill Stuart, Michael Kors, Nicole Miller, DKNY, Prada, Oscar de la Renta, Gucci, Tommy Hilfiger, Max Mara, Gianni Versace, Dolce & Gabbana et Moschino...
Elle fait la couverture du Harper's Bazaar, Elle, Numéro et des Vogue France et US... La belle apparaît également dans de nombreuses campagnes de publicité prestigieuses, telles que Donna Karan, Calvin Klein, Guy Laroche, Versace, Chanel et Krizia. Sa côte ne fait que grimper, son nom commence à être sur toutes les lèvres et les journalistes lui confèrent l'étiquette de top model, une appellation qui n'a guère de sens pour elle.
En effet, elle juge qu'il y eu une génération de tops - Naomi, Kate, Christy, Cindy, Claudia, etc - qui ont fait leurs réputations en défilant pour les plus grands, et en ne travaillant qu'avec la crème des crèmes, mais que désormais la presse accorde ce titre à des filles qui n'ont pas fait le quart de leurs aînées... Pour Carmen, les médias ont galvaudé le terme de "top modèle" qui a désormais perdu son sens. De toute manière, elle dit n'avoir jamais apporté d'importance au statut qu'on voulait bien lui conférer. Pour elle, le but est de comprendre les rouages du business mode, afin de mettre toutes les chances de son côté pour perdurer.
En 2000 arrive la campagne qui va faire d'elle une figure mondialement connue : elle est le visage du parfum Dior "J'adore". Elle gagne peu après le model Award attribué par Vogue. Elle sort alors réellement du lot et en 2001 obtient des places de choix durant les défilés : elle ouvre les shows Versace, Ralph Lauren et Oscar de la Renta, et clôt celui de Valentino, Anna Sui et Balmain. Elle fait également une apparition dans le film Zoolander, où elle joue son propre rôle, c'est-à-dire celui d'une top model en pleine gloire.
En 2002, un magazine américain la classe comme la deuxième mannequin la plus importante sur le plan mondial. Elle continue à faire la couverture de Vogue et rafle plus que jamais les plus belles places lors des shows. Elle ouvre et clôture ainsi les défilés de Marni, Oscar de la Renta et Yves Saint Laurent, et clôture ceux de Gucci et de Valentino. Elle intègre même la très fermée Victoria's Secret team... En 2003, elle associe son image à la très controversée campagne porno chic de Gucci, tout en continuant à être la Guest Star des fashion week. En 2004, la présence de Carmen Kass sur un podium se facture 200 000 $.
À cette période, la belle peut prendre un peu de liberté et s'octroyer à 26 ans le droit de varier ses activités. Elle intègre ainsi un parti politique estonien et rate de peu un siège au parlement européen. Elle qui joue tous les jours aux échecs est nommée présidente de la ligue nationale estonienne. Elle rachète également des parts dans l'agence de mannequins où elle avait fait ses débuts. Une tête bien faite dans un corps de rêve... la nature est parfois bien avisée.
Durant les deux années qui suivent, Carmen Kass se fait plus rare, on la dit même enceinte. Puis des rumeurs sur de possibles troubles alimentaires courent sur son compte, sa minceur extrême attise la curiosité et alimente les cancans de la sphère mode. En 2006, elle apparaît néanmoins dans trois campagnes de publicité : DSquared, Michael Kors, et Chloé.
L'année 2007 la voit revenir plus rayonnante que jamais sur pas moins de 10 campagnes de publicité, comptant entre autres Versace, Michael Kors et Salvatore Ferragamo. Les défilés de la saison qui s'achève lui ont également réservé une jolie place : elle fut de ceux de Bottega Veneta, Gucci, Balmain, Karl Lagerfeld, et a clôturé les shows Giles Deacon et Versace.
Lorsqu'on lui demande ce que lui a apporté le métier de mannequin, elle répond qu'il lui a permis d'avoir confiance en elle, de développer son endurance et son courage, et de comprendre que chacun pouvait avoir sa place au soleil. Pour l'instant, elle vit à New York et se préoccupe peu du futur.
Et lorsqu'un journaliste lui demande où elle se voit dans cinq ans, Carmen Kass cite ce poème de Ray Evans :
When I was just a little girl
I asked my mother what will I be ?
Will I be pretty ? Will I be rich ?
Here's what she said to me :
Que Sera Sera, Whatever Will Be, Will Be
The future is not ours to see, Que Sera Sera
What will be, what will be...
Par Lise Huret, le 11 octobre 2007
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