Demna Gvasalia, un nouvel espoir pour la mode ?
Depuis son arrivée à la direction artistique de la maison Balenciaga, le géorgien Demna Gvasalia fait palpiter le coeur du petit monde de la mode, qui voit en lui un créateur susceptible d'apporter une énergie nouvelle à une industrie en plein essoufflement. Reste à savoir si celui-ci se révèlera à la hauteur des espérances que certains placent en lui…
Si l'on en croit la dénicheuse de tendances Li Edelkoort, Demna Gvasalia s'apprêterait à injecter une dynamique inédite à l'industrie de la mode. Un point de vue que l'on pourrait aisément partager après la lecture de l'interview qu'accorda récemment l'intéressé au magazine WWD. Il faut dire que l'homme y parle de replacer le vêtement au centre de la réflexion, de créer des pièces que les gens ont réellement envie de porter, d'arrêter de faire de la mode un fantasme inaccessible, mais aussi et surtout d'identifier les attentes de l'individu lambda en matière de coupes, de textures, de ressenti textile. Il y remet également en cause la saisonnalité des collections (qui a selon lui perdu tout son sens) ainsi que la surproduction de vêtements.
Autant dire que Demna Gvasalia y apparaît comme l'homme providentiel, celui qui saura redonner du sens à la mode et inaugurer une ère nouvelle. Le lecteur n'a alors plus qu'une hâte : découvrir la première collection du créateur chez Balenciaga, qui illustrera ses propos, sa vision. Oui mais voilà, sa vision, cet ex de chez Martin Margiela a déjà eu l'occasion de la matérialiser au sein du collectif Vêtements... pour un résultat assez peu convaincant. Là où l'on s'attendrait à voir de la nouveauté, une approche pointue de la coupe, des pièces comblant nos envies de pragmatisme et des produits susceptibles de nous faire à nouveau aimer la mode, nous découvrons en effet une pâle variation de ce que Martin Margiela et Rei Kawakubo ont pu faire dans les années 80/90. Pourquoi donc mettre au centre de son processus créatif la déconstruction du vêtement si c'est pour se contenter de paraphraser ses aînés ?
Par ailleurs, si l'on salue son choix d'utiliser des fripes pour confectionner de nouvelles pièces, force est de constater que ce parti pris n'offre pas de réelle valeur ajoutée à ses créations. De manière générale, on a l'impression que Demna Gvasalia fait le bon constat, mais n'apporte pas les bonnes solutions. Un bilan pour le moins mitigé qui n'a pas empêché la fashion sphère de s'enflammer pour l'underground réchauffé des défilés de la griffe, la presse de se gargariser du "phénomène Vêtements" et Kering de confier à Demna Gvasalia les clefs de Balenciaga...
Reste dès lors à espérer que le créateur géorgien trouvera au sein des archives Balenciaga de quoi offrir à sa philosophie une expression textile convaincante. A suivre...
Par Lise Huret, le 26 novembre 2015
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