Défilé Balmain

Fashion week de Paris, la déception

Entre charte tacite à respecter (afin d'éviter l'ire des réseaux sociaux), egos démesurés dépourvus de talent, entre soi navrant, absence de génie, routine bien huilée manquant de vitalité et originalité dépourvue de subtilité, la dernière fashion week parisienne fit grise mine...
Défilé Balmain
Les maisons n'ont pourtant pas lésiné sur les moyens. Afin de pallier son envie grandissante de voyages, Olivier Rousteing a ainsi fait déambuler les mannequins Balmain sur les ailes d'un avion Air France. De son côté, Maria Grazia Chiuri (Dior) s'offrit la galerie des Glaces en guise de podium. Des décors impressionnants qui ne parvinrent cependant pas à contrebalancer l'ennui provoqué par les toilettes présentées.

En cette fin de fashion week parisienne, l'impression qui prédomine est qu'en 2021 le vêtement n'a plus rien à dire et que seuls comptent désormais la composition du casting et les mises en scène (miroirs "anti-patriarcat" chez Dior, "drive in" chez Coperni ou encore clip déjanté pour party girls déconnectées chez Lanvin) susceptibles de faire grimper le nombre de likes sur Instagram. 

Comme si les créateurs d'aujourd'hui avaient usé jusqu'à la corde les gimmicks de leurs prédécesseurs (déconstructions, morphings, détournements…) et n'osaient pas s'aventurer sur une nouvelle page blanche. Sur les podiums, les excès sont ainsi attendus, les transgressions banales, les déconstructions dépourvues d'âme… (Givenchy, Balmain

Les causes de cette léthargie créative ? Elles semblent être multiples :
Si le manque d'élégance, de beauté, de tombé parfait et d'évidence stylistique peut servir un temps un parti pris stylistique, celui-ci finit par rendre les collections totalement illisibles et par susciter un désintérêt du public pour la mode. 
Trop de collections, trop de modèles, trop d'informations, trop de posts, trop de tweets, trop de séries Netflix... la société est en overdose permanente. Comment les designers pourraient-ils dès lors ne pas être impactés par ce turn-over incessant empêchant de créer sereinement et intelligemment ? 
En mettant en avant des jeunes créateurs dont le talent reste à prouver (on pense notamment à Nicolas Lecourt Mansion, lauréat du prix Pierre Bergé à l'ANDAM 2019 - voir ici et ), le petit monde de la mode condamne le paysage fashion à se perdre dans les méandres du faussement créatif. 
Les gadgets ont pris le pas sur les vêtements en tant que tels.
L'intemporalité fait défaut à bon nombre de collections ; une qualité pourtant essentielle à l'heure où le turn-over de la mode se voit sérieusement remise en question. 
Plus généralement, tout cela manque de panache, de portabilité, d'évidence, de choc esthétique, de décharge chromatique… 

Et si les mini robes à godets Louis Vuitton, le bomber Atlein et quelques pièces Miu Miu (voir ici et ) réussissent à tirer leur épingle du jeu, ils ne parviennent néanmoins pas à faire oublier le brouhaha stylistique actuel où s'entrechoquent appât du gain, manque de vision et partis pris sincères mais mal exploités. 

PS : Il doit sûrement être possible de trouver davantage de points positifs au sein des collections parisiennes ; difficile cependant de rester lucide lorsque Dries Van Noten, Nicolas Ghesquière et Alexandre Mattiussi se montrent aussi décevants...
Par Lise Huret, le 15 mars 2021
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13 commentaires
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SpunkyIl y a 3 ans
WoW ! Il y a un point où je te rejoins complètement, c’est celui concernant les jeunes créateurs primés. Chez Nina Ricci, le duo créatif se targue de ne pas aimer l’adn romantique de la maison... bah ça se voit tellement c’est laid. Idem pour Givenchy, les chaussures étaient moches, les fringues gothiques. Vuitton, je ne suis pas touchée par le travail du D.a. Par contre Balmain et Dries Van Noten qui a montré peu de modèles ont été décevants. Isabel Marant a joué sa partition et Chloé j’ai trouvé ça pas terrible. En revanche, pour une fois, j’ai trouvé le pap Chanel assez enthousiasmant. Hermès a présenté une jolie collection. Lanvin, excellent clip, pour les fringues... je suis moins emballée. Pour Dior, je partage également ta vision mais apparemment ça plaît. Loewe, Miu Miu... on a vu mieux. Elie Saab, lui fera plaisir à sa clientèle sans souci. Paco Rabanne, plus portable que d’habitume. Il y avait pas mal de sequins sur les défilés. Il y avait des vidéos pas terribles aussi.Donc, dans l’ensemble, je suppose qu’il faudra voir en boutique pour se forger une meilleure opinion. Ma whishlist PFW 22 compte zéro pièce pour l’instant, c’est étonnant car j’achète beaucoup en hiver. Il n’y a que Ports 1961 que j’ai trouvé sympa, les chaussures en particulier. Bref, merci pour ton debrief que j’attendais.
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Oeil de Serpent Il y a 3 ans
Je n'aurai su mieux dire. Cela fait plaisir de lire un article qui ose décrire la nullité et la fadeur des tristes collections proposées.
Le spectacle était au rendez-vous mais dans l'ensemble absolument aucune substance sur les podiums. Il ne sera donc pas bien difficile de faire mieux. En tout cas il faut l'espérer. Je n'ai pas encore tout vu mais le peu et ce que je lis là n'est pas du tout encourageant. Je garde un petit espoir en les accessoires.
Une fois encore bravo et merci pour cet article honnête.
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CarolineIl y a 3 ans
Je suis d'accord, les fringues sont moches... mais elles le sont depuis quelques années, non? Qui se préoccupe aujourd'hui de proportions, de tissus, de matières et de tombé? Vu qu'on vend des hauts en viscose à 1200 euros (vu chez Bottega Veneta l'an passé)
Au moins, je me dis que les shows sont plus drôles, à la limite de clips comme celui de Lanvin qui tire bien son épingle du jeu - d'ailleurs, dans les clips de musique, les fringues ne sont pas du tout essentielles...
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Patricia Il y a 3 ans
Je suis d’accord sur le fait que la pléthore de défilés a de quoi étouffer la créativité. J’ai quand même bien aimé le défilé Chanel.
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IndyaIl y a 3 ans
Et si c'était un autre point positif de la pandémie? En effet les femmes ont déjà jeté leurs teintures de cheveux toxiques et leur maquillage inutile. Il restait à balancer les vêtements importables, impayables et crées pour des porte manteaux! Que dire de la pertinence des fashion week...de quoi ont besoin notre planète et ses habitants?
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HelleIl y a 3 ans
Le truc c'est que malgré les besoins de notre planète et ses habitants, les marques ont visiblement encore les moyens de filmer au chateau de Versailles ou sur les ailes d'un avion. C'est surtout déprimant de savoir que ça ne s'arrête jamais, même en cas de pandémie, ça et les tournages Marvel. Et ce, même quand tout le monde en a un peu marre, et que les fringues perdent de leur intérêt. Peut-être parce que ce sont des sujets qui ont le monopole sur notre besoin de frivolité.

Et le retour au purement utilitaire, j'y crois moyennement aussi, parce que ce ne serait pas un "retour". Le maquillage ça, existe depuis des millénaires. On déprime quand on n'a rien d'esthétique dans la vie. Comment rentabiliser ça quand les gens ont moins besoin de nouvelles fringues, mais sont plus vissés sur twitter à la maison que par le passé? Des miroirs "anti-patriarcat" au chateau de Versailles. 0___0

Vraiment extrêmement marre du "féminisme" de girlboss aussi. Pour le coup Maria Grazia Chiuri le fait depuis des années donc visiblement, je pense que c'est sincère, mais c'est une remise au goût du jour des manuels d'étiquette pour jeune fille avec un lifting "radical chic", duquel elle n'a d'ailleurs progressivement plus besoin.
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jickyIl y a 3 ans
C'est déprimant de voir à quel point ils se foutent de l'état de la planète... Rien de change zero remise en question, ça consomme, ça fabrique, ça consomme, ça fabrique... jusqu'à quand??
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HelleIl y a 3 ans
Sérieux quoi.

En fait, ça fait quelques années dans les médias que les différentes marques (fringues et autres) essaient de faire parler d'elles avec des images "problématiques" qui feront, d'une manière ou d'une autre, réagir les réseaux sociaux. Même si c'est un soi-disant scandale (une pub raciste ou sexiste ou autre), la marque n'en pâtira pas, voire l'industrie en général en profitera, parce qu'elle deviendra le site d'une réflexion progressiste, un modèle pour tout le monde. Et ça se passe vraiment intégralement au niveau de l'image, et parfois de quelques #metoo de la part d'employé.es avec suffisamment de statut pour qu'on les écoute. Et le truc avec tout ça c'est que, si l'un.e ou l'autre est bourré.e de préjugés, ça ne fait rien, limite c'est utile. Est-ce que Teen Vogue va souffrir des tweets racistes d'Alexi McCammond? Non: l'organisation pourra prouver qu'il a des anticorps progressistes solides en l'expulsant.

Le truc c'est que, comme tout dans la mode depuis les employés jusqu'au fric et les fringues elles-mêmes, ce genre de processus est jetable: il a une durée de vie limitée. Et je me demande s'ils ne vont pas surtout le faire à l'avenir avec l'environnement et, directement, le luxe, à la place du progressisme. C'était déjà assez saisissant il y a quelques années quand Calvin Klein (il me semble?) avait des popcorns parterre, ou Chanel avec leurs arbres l'autre fois, etc.

C'est ce qui était frappant avec un média comme Man Repeller, aussi, je veux dire, avec le nom elles avaient une approche des fringues soi-disant libératrice, mais sur les fashion week elles avaient zéro recul critique, je pense qu'elles avaient pas intérêt: le modèle économique de ce genre de site fait qu'elles n'ont pas intérêt à courroucer les marques. Du coup quand elles se retrouvent à marcher sur de la bouffe à un défilé.

Finalement, le progressisme dans la mode, c'est le sucre pour faire digérer à quel point ils n'en ont rien à foutre du reste. Et ça passe d'autant mieux que sûrement une majorité des gens sont sûrement sincèrement anti-sexistes et anti-racistes, et ils ont raison de l'être, et même ces causes-là deviennent une sorte de "il faut respecter les gens de qualité" au contact de cette industrie.

Et tout ça c'est avant même qu'on ne parle du "cachez toutes ces ouvrières textiles que nous ne saurions voir".
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HelleIl y a 3 ans
"Du coup quand elles se retrouvent à marcher sur de la bouffe à un défilé." la nana qui n'a pas fini sa phrase et a posté sans relire... mais j'étais toujours un peu sidérée par le fait qu'elles fassent "iiiiii quel talent!" systématiquement.

Et je me focalise sur elles parce que leur site était intéressant, les autres sont plutôt pires.
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EstarlaIl y a 3 ans
Je n'ai quasiment rien suivi des dernières FW et je me rends compte que je suis lasse aussi des red carpets, cérémonies et remises de prix et tout autre évènement fashion... Je ne suis pas sure que ce soit un effet secondaire de la pandémie, car comme Helle le dit, moins ça va plus on a besoin de voir du beau dans la vie. C'est peut-être que tout le système fashion tel qu'on le connaît arrive à la saturation... Vers un changement de paradigme ?
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JoelIl y a 3 ans
Bonjour, la mode c'est très bien, mais faut aussi avoir les moyens de se la payer. Mais faut continuer. Pas baisser les bras, sa va repartir.
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Geraldine Il y a 3 ans
Merci pour votre franc parler ! Ça fait tellement de bien d’entendre une parole sincère au milieu du brouhaha complaisant de la Fashion Sphère qui finit par s’auto-cultiver hors sol.
Tout à fait d’accord avec les commentaires également.
Mais n’oublions pas cependant les chiffres hallucinogènes du luxe (+30% pour certaines maisons), en tant de Covid... ça laisse songeur sur la schizophrénie de ce monde qui d’un côté est las de toute cette hystérie stérile et qui de l’autre se passionne de manière addictive à la nouveauté, fut elle moche, démagogique et parfois obscène. C’est bien à cette partie là que la Fashion Week s’adresse.
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ArianeIl y a 3 ans
Je suis d’accord!
Trop d’information tue la créativité!
C’est pareil pour la musique d’ailleurs. C’est très triste.
La création se fait dans le vide. L’inspiration vient on ne sait d’où, et internet il me semble coupe l’imagination.
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