Si l'on éprouve une réelle fascination pour l'infatigable control freak qu'est Karl Lagerfeld, beaucoup d'admiration pour le très healthy et ultra productif Marc Jacobs et un intérêt toujours renouvelé à l'égard du sex-symbol Tom Ford, c'est une immense tendresse doublée d'une bonne dose de respect que l'on ressent à l'évocation du nom d'Alber Elbaz. Il faut dire qu'il est l'un des rares designers de premier plan à afficher une humilité à toute épreuve ainsi qu'une indéniable constance dans le talent...
C'est donc toujours avec beaucoup d'enthousiasme que l'on accueille les trop rares interviews de cet incorrigible timide, à l'instar de celle parue dernièrement au sein de l'édition online du Vogue UK. Entre analyse pertinente, autodérision et mise à nu, Alber Elbaz s'y révèle aussi clairvoyant que hors-norme.
Au sujet de la vague de burnouts sévissant actuellement dans la profession, celui-ci remarque avec justesse que les designers de mode sont les seuls créatifs à qui l'on exige un tel rendement, bien loin de celui des écrivains, chanteurs ou réalisateurs de cinéma. Le DA de Lanvin estime ainsi qu'il est parfaitement compréhensible que des créateurs à qui l'on demande de respecter la cadence de 8 à 10 collections annuelles se retrouvent un jour ou l'autre broyés par le système.
S'en suit quelques confessions oscillant entre humour, second degré et touchante sincérité, où il avoue notamment que si bon nombre de ses collègues ont recours aux paradis artificiels pour soutenir la pression, lui s'interdit d'y toucher, non pas par conviction, mais plutôt - connaissant son attirance irrépressible pour les pâtisseries et autres friandises - par peur de se transformer rapidement en junkie...
Il reconnait également éviter au maximum les mondanités fashion, tant il déteste son apparence sur les photos. Un aveu désarmant, à l'heure où la plupart de ses homologues ont tendance à accorder une attention démesurée à leur physique.
L'homme révèle enfin avoir sérieusement envisagé d'arrêter la mode après son éviction de chez Yves Saint Laurent en 2001. Hypocondriaque, aimant les infirmières et la nourriture des hôpitaux, il se serait alors bien vu devenir médecin, si les études pour y parvenir n'avaient pas été aussi longues. Il renouera néanmoins très vite avec la fashion sphère en prenant le poste de DA de Lanvin, où ses clientes lui avoueront se sentir protégées des aléas de l'existence une fois revêtues de ses créations...
Succession de micro révélations, cette interview vient au final confirmer ce que l'on savait déjà : Alber Elbaz est bel et bien de très loin le plus craquant et le moins prétentieux des virtuoses de la mode...
Voir l'interview : http://www.vogue.co.uk/alber-elbaz-on-drugs-designer-pressure-and-his-ysl-dismissal
Par Lise Huret, le 08 septembre 2011
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